jeudi 17 novembre 2016

278

posé là au milieu de la terre l'oeuf qui n'éclot pas

()

toutes les formes de vie coincées
et l'histoire entre parenthèses

mercredi 16 novembre 2016

277

Au moment de recevoir son trophée, le tennisman prononça un discours pour une fois original:
J'aimerais remercier mes fans sans les cris et les huées desquels mon adversaire n'aurait pas perdu son service dans les moments décisifs; j'aimerais remercier le technicien qui a réglé la hauteur du filet, idéale pour mon jeu, incompatible avec celui trop stéréotypé de mon adversaire; j'aimerais remercier la sage-femme qui fut délicate avec mes pieds au moment de ma naissance - j'en tire encore quelques bénéfices aujourd'hui; quelques mots pour toi, adversaire sur le terrain mais ami en dehors quand tu perds: tu as réalisé un tournoi formidable, tu as battu les joueurs que je n'aurais pas voulu affronter en finale, j'aimerais te remercier d'avoir joué comme tu l'as fait pendant cette finale, je n'ai pas eu à trop forcer mon talent mais j'ai tout de même pu en montrer toute l'étendue; enfin j'aimerais remercier tous ceux sans qui un tel évènement n'aurait pu voir le jour, je pense aux parents des ramasseurs de balles, je ne sais pas comment vous les avez conçus mais leur taille et leur poids sont idéals, on ne les entend pas, ils courent vite, ne prennent pas de place, les balles s'aimantent dans leurs mains, good job; j'aimerais ne pas remercier mes sponsors puisque mon adversaire qui porte les mêmes chaussures, la même raquette, les mêmes cuissettes, les mêmes chaussettes, l'a déjà fait, et je ne crois pas qu'ils soient indispensables pour que nous puissions pratiquer notre sport. Nous avons simplement besoin d'une raquette, d'une balle et de l'attraction terrestre pour que la balle, toujours, retombe reparte et retombe. Merci.

mardi 15 novembre 2016

276

L'histoire aurait pu être plus tragique, avortée avant même son commencement: il y aurait d'abord eu un oeuf, posé là au milieu de la terre, qui jamais ne se brisa, et puis plus rien. Ni poule ni poussin ni coq ni dinosaure ni coccosteus ni plesiosiro madeleyi ni homo sapiens rien rien rien, simplement un oeuf intact.

lundi 14 novembre 2016

275

Mon autobiographie commençait par cette scène où, installé à mon bureau, j'écrivais la première scène de mon autobiographie qui était une scène où l'on me voyait installé à mon bureau en train d'écrire une scène, probablement la première de mon autobiographie où justement, moi, le narrateur, je racontais comment j'écrivais cette première scène de mon autobiographie, ce texte où la première scène consistait à montrer un personnage, moi, à son bureau, le mien, en train d'écrire la première scène de son autobiographie, la mienne, qui commençait justement par une scène d'écriture à un bureau sur lequel il y avait un ordinateur ouvert, on pouvait lire sur l'écran du coin de l'oeil les premières lignes Mon autobiographie commençait par cette scène où, installé à mon bureau, j'écrivais la première scène de mon autobiographie qui était une scène où

vendredi 11 novembre 2016

274

Dans mon autobiographie, j'omis de mentionner un détail qui me coûta cher: l'ami qui m'avait sauvé la vie. C'est lui en effet qui un jour me retint par la manche tandis que je m'apprêtais à traverser la route - le feu était rouge, le camion n'aurait pu ni freiner ni m'éviter. Quand cet ami lut mon autobiographie, il remarqua son absence, m'intenta un procès qu'il remporta, m'accusant de générer des profits qui selon lui devaient lui revenir. Si l'autobiographie avait pu voir le jour c'était parce que les miens n'avaient pas eu de fin, grâce à lui, trancha le juge. J'ai maintenant une dette éternelle envers cet ami.

jeudi 10 novembre 2016

273

En fait le flamant rose ne cache rien quand il replie sa patte sous ses plumes. Ni caillou, ni poisson, ni pièce d'or. Il la réchauffe, c'est tout. Quelle déception.

mercredi 9 novembre 2016

272

Aujourd'hui donc nous savons. La nouvelle est tombée. De source sûre. Le résultat est définitif et tous nos rêves sont évaporés. C'est en effet un caillou que la flamant rose cache dans sa patte cachée sous ses plumes. Pourquoi? C'est là-dessus que nous devons maintenant réfléchir, nous avons besoin de comprendre. D'après l'un de mes amis, spécialiste, le flamant rose serait un animal qui ne dort jamais. Au moment de s'endormir, les muscles de sa patte se détendent, il lâche le caillou, le bruit le réveille. C'est à ce moment qu'il change de patte. Il détend alors la patte qui était repliée et replie la patte d'appui qui était dans l'eau; mais pourquoi tenir dans celle-ci un caillou dont le bruit produit par la chute le réveillera une fois encore?